• Riviera

Publié le par 67-ciné.gi-2006

Riviera drame de de Anne Villacèque
avec :
Miou-Miou, Elie Semoun, Vahina Giocante, Mathieu Simonet, Antoine Basler, Franc Bruneau

durée : 1h38
sortie le 18 janvier 2006

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Synopsis
Stella, dix-sept ans, belle et blonde, vit avec sa mère, Antoinette, sur la côte d'azur. l'une est danseuse dans des clubs, l'autre femme de chambre dans un hôtel de luxe. l'une travaille la nuit, l'autre le jour, mais leur lien est permanent. Elles sont ensemble spectatrices d'un monde qui dépense et jouit, d'un monde comme à la télé qu'elles côtoient sans cesse sans jamais le toucher.
Arrive Romansky, agent immobilier en mission sur la côte. il croise la mère dans l'hôtel où il réside, puis désire la fille au club où il vient tuer son ennui.
Alors, l'improbable a lieu : une rencontre entre une trop belle fille et cet homme seul, peut-être le début d'une histoire d'amour.

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Entretien avec Anne Villacèque
- « Le film est brutal, dérangeant d’un bout à l’autre. Avez-vous décidé de ne pas laisser respirer les spectateurs ? »

Anne Villacèque :
« Il est certainement très brutal et c’est tant mieux. Je ne vois pas comment j’aurais pu raconter autrement cette histoire. Je ne pouvais pas dire les choses de façon policée et légère. Je montre la brutalité faite aux enfants et aux adolescents d’aujourd’hui, j’essaye d’inscrire mon film dans la réalité de ce monde qu’on leur propose et auquel ils sont confrontés tous les jours. Alors oui, c’est très brutal, parce que, dès le début du film, on sent que les personnages vont dans le mur, et qu’il n’y aura pas de miracle pour les aider à s’en sortir. Je ne pouvais pas inventer de miracle parce que le propos du film est de dire que, justement, il n’y en a pas. C’est d’autant plus brutal que sur la Riviera tout est joli, tout brille. Les filles sont blondes et bronzées, les décapotables roulent à fond la caisse, et il y a du strass et des paillettes jusque sur les ficelles des strings. Mais mon film n’est pas une théorie : je voulais juste raconter une histoire. J’aime les histoires, Maupassant et Balzac, les personnages complexes et ambigus. »



- « Justement, comment pourriez-vous raconter cette histoire ? »

A. V. : « C’est l’histoire d’une petite fille qui voudrait bien vivre et aimer, et qui se prend des coups, l’histoire simple et éternelle de l’innocence bafouée. En toile de fond, cette France du Sud, souvent fantasmée comme le pays du soleil et de la mer toujours bleue, mais qui est surtout pour moi une image très forte des contradictions françaises : ça a l’air d’être charmant et très civilisé de loin, et puis, quand on se rapproche, on se prend en pleine figure le vide idéologique, la violence sourde des rapports sociaux, la solitude de tous.
C’est avec ces éléments de départ que j’ai eu envie de faire un film. Je venais de tourner un documentaire à Marseille sur de toutes jeunes filles de 11-12 ans, sur leur rapport à leur corps, leurs rêves, leur culture.
Ces filles dégageaient une énergie et une envie de vivre formidable : à douze ans, rien ne peut entamer l’idée que l’avenir réserve de merveilleuses surprises. Pourtant on s’aperçoit que la société ne propose plus rien, plus aucun rêve, ni aucun modèle consistant pour nourrir cette énergie. Leurs seules distractions, c’était le shopping du samedi après-midi au Centre commercial du coin, et, surtout, plusieurs heures chaque jour, la télé - le Loft, ou la Star Ac’. Alors, à douze ans, elles étaient toutes des petites Loana en puissance : mignonnes, pleines de vie, mais déjà abîmées par l’idée qu’il fallait à tout prix avoir des gros seins et des vêtements de marque, que seule l’apparence compte pour réussir sa vie...
Le coeur de Riviera est sans doute là, autour de cette question : comment se construire sur du vide, des faux-semblants ?
J’ai imaginé alors le personnage de Stella. Stella, c’est à la fois Marilyn, et une petite fille qui ressemble à toutes les autres petites filles d’aujourd’hui : de la chair à castings. C’est un personnage qui me touche par sa pureté. Elle donne tout ce qu’elle a, tout le temps. Mais, comme on ne lui a pas appris à dire non ni à souhaiter autre chose que de ressembler à une image de télé, cette naïveté et cet abandon vont la briser.
Stella, elle n’est pas brutale, c’est même une fille très douce. Comme dans les contes de fées, je l’ai imaginée belle et blonde. La blondeur, au cinéma, c’est magique : ça brille, et ça parle directement de désir.
Et puis il y a sa mère, Antoinette, un personnage complexe, tourmenté, un vrai personnage de tragédie. Elle arrive à un âge où les femmes sont fragiles parce qu’elles deviennent transparentes au regard des hommes. Brusquement, elles cessent d’être un objet de désir. J’ai voulu qu’elle soit belle avec son visage de cinquante ans, et qu’on sente qu’elle porte un vécu, qu’elle a sans doute beaucoup aimé. Elle devait être une femme, avant d’être une figure maternelle. C’est elle le véritable moteur de l’histoire : c’est elle qui voit les choses, à distance, qui sent, et qui devine. C’est elle qui force le destin en provoquant la rencontre entre Romansky et Stella. Et c’est encore elle qui pousse sa fille dans ce jeu de rôles où il faut être la plus belle pour exister. Car la mère est fière de la beauté et de la jeunesse de sa fille, cette beauté est sa consolation, sa revanche sur la vie, son seul espoir.
»



- « Les rapports entre mère et fille sont assez troubles... »

A. V. : « C’est un couple très fusionnel. Le père est complètement absent - a-t-il même jamais existé ? Une mère seule et vieillissante, et une fille unique et très belle, c’est un couple fort, un couple en miroir. Leur lien est tel qu’il peut presque se passer de mots et de contacts. En dehors du lien téléphonique via le portable, la mère et la fille se voient très peu. Elles sont rarement réunies à l’intérieur d’un même plan, dans le film. L’une travaille le jour comme femme de chambre, et l’autre, la nuit, comme go-go danseuse, de telle sorte qu’elles passent leur temps à se croiser dans l’appartement où elles vivent.
Pour ce personnage d’Antoinette, je voulais une comédienne singulière, avec un fort pouvoir d’incarnation, et une vraie dimension populaire. Je crois que Miou-Miou apporte tout cela, et au-delà, une fragilité et une tension qui traversent tout le film.
Pendant l’écriture du scénario, j’ai beaucoup pensé à Bellissima de Visconti, avec la grande Anna Magnani, cette histoire magnifique d’une mère qui pousse sa fille à devenir ce qu’elle n’a pu être elle-même. Par amour, la mère transforme la fille en objet. Derrière, il y a le mirage de Cinecitta, et puis toute la dimension sociale et historique de l’Après-Guerre : la misère, la reconstruction du pays. On sait d’emblée qu’il n’y aura pas de miracle, à la toute fin de l’histoire, parce que l’époque est impitoyable.
Pour moi, Riviera était une version contemporaine de Bellissima. Aujourd’hui, ce sont les mères qui poussent leurs filles dans le Loft, et qui sont prêtes à les vendre pour pas cher. Antoinette rêve sans doute plus classiquement de caser sa fille, de lui faire rencontrer des hommes bien. Elle aime passionnément sa fille, sans aucun doute. Mais, en même temps, elle est prête à la vendre pour rien, au premier venu, au lieu de lui donner les moyens de construire sa vie.
»

- « Pouvez-vous nous parler des personnages masculins ? C’est une galerie de portraits au vitriol... »

A. V. : « Je ne dirais pas ça. C’est vrai que je joue beaucoup sur les archétypes : le play-boy, le patron de boîte de nuit, l’agent immobilier, le livreur de pizzas, et, pour finir, le producteur de porno. Mais Riviera est avant tout un jeu sur les clichés, sur l’apparence. Et je crois que les personnages masculins sont plus complexes et plus intéressants que leur simple apparence. Le jeu sur l’archétype permet de comprendre ce que les uns projettent sur les autres. C’est un film sur le regard, le regard des gens les uns sur les autres. Le regard que les hommes portent sur ces deux femmes, ce qu’ils renvoient à la mère et à la fille : tu es belle/tu as été belle, je te désire/ton désir me dégoûte.
Ce qui est violent, en définitive, ce ne sont pas les personnages, ce sont les rôles qu’ils s’efforcent d’incarner, parfois avec cynisme, d’autres fois par pur conformisme social, ou même, tout simplement, par peur. Le résultat de ce jeu de rôles permanent, c’est que les rencontres n’aboutissent pas. Parfois, on se dit que ça pourrait avoir lieu, ça pourrait être plus simple. Il pourrait y avoir de vrais moments de tendresse ou de désir partagé entre les personnages. Et puis, ça tourne court parce que chacun attend quelque chose, désespérément, et que cette attente empêche de voir l’autre tel qu’il est. Personne ne parvient à percer le jeu des apparences.
J’aime beaucoup la scène entre Antoinette et le livreur de pizzas. Je crois qu’il y a un vrai trouble, une vraie histoire possible. J’ai filmé le moment de flottement, entre eux. Je voulais laisser ça en suspension, qu’on perde comme eux la notion du temps, des heures qui passent dans la nuit. Et puis, ce qui fait échouer la rencontre, à la fin, ce n’est pas eux, c’est très clairement une question de pression sociale : une femme de cinquante ans qui a du désir, c’est forcément une pouffiasse.
J’ai aussi une tendresse particulière pour Romansky, l’agent immobilier égaré dans un hôtel de luxe, sans doute pour épater sa propre clientèle, et qui est donc pris pour ce qu’il n’est pas par la mère et la fille. De malentendus en malentendus, Romansky provoque les catastrophes.
Le drame de Romansky, c’est qu’il se fait passer pour un type qui assure : riche, à l’aise. Tout ce qu’il n’est pas, en quelque sorte. L’angoisse et la fragilité ne sont pas acceptables pour un homme dans une situation de séduction. On se dit que, s’il arrivait à accepter tout ça, à se montrer tel qu’il est, encore une fois, la rencontre pourrait avoir lieu, parce que Stella est vraiment touchée par sa gentillesse, et elle n’a probablement pas l’habitude qu’on l’invite au restaurant - c’est tout le contraire d’une petite fille gâtée.
»



- « Le film joue énormément sur le désir, les frustrations, les non-dits, comment avez-vous traduit cela au niveau de l’écriture ? »

A. V. : « Je crois que la grande scène centrale entre Stella et Romansky est assez exemplaire du travail que je voulais faire. Elle était pour moi l’un des enjeux du film, le moment où les choses basculent vraiment. Je l’avais entièrement écrite du point de vue de Romansky : on le sentait passer du désir à l’impuissance, puis à la rage. Après, il fallait traduire ça à l’image, sans paroles d’explication, avec des échanges de regards, des gestes à contre-temps. Et tout le dialogue joue sur le double sens : il y a ce que l’un veut dire et ce que l’autre entend. On sent tout à la fois que les deux personnages sont tout près de se comprendre et d’être bien ensemble, et, en même temps, qu’ils sont perpétuellement dans le décalage. Mais, est-ce qu’un rendez-vous amoureux n’est pas toujours un peu comme ça, à la fois drôle et tragique ?
De façon plus générale, j’aime avoir des surprises, ne pas maîtriser les choses. Je préfère découvrir au fur et à mesure du travail ce que je cherchais à dire réellement. Du coup, je crois qu’on peut lire chaque séquence à plusieurs niveaux. Il y a un aspect comique, mais aussi de la tendresse, de la mélancolie, et encore, de la violence.
»

- « Comment s’est élaboré le style du film, avec ces cadres serrés ? »

A. V. : « Avec le directeur de la photographie, Pierre Milon, nous avions décidé de tout filmer à l’épaule en privilégiant les longues focales, le 50mm, mais surtout, le 85mm, de manière à isoler les personnages dans le cadre et à montrer le décor par fragments. La Côte d’Azur est là, bien présente, à travers les couleurs, le bleu de la mer, la lumière éclatante du jour, ou les multitudes de lumières scintillantes la nuit. Mais le film n’est jamais vraiment descriptif. Je ne voulais pas d’un dépliant touristique. Trop de lieux sont saturés d’images et de représentations. La Promenade des Anglais, par exemple, est surtout présente à travers la bande-son, le bruit de fond permanent.
En choisissant les décors au moment des repérages, nous nous sommes dit que le principal personnage du film, c’était peut-être cette Riviera française, qui a une signification imaginaire assez riche mais, qui, concrètement, est une région où l’urbanisation intensive a détruit à peu près tout ce que le paysage pouvait avoir d’exceptionnel et de poétique. C’est très peu poétique, la Côte d’Azur. C’est surtout bruyant et pollué. Le film joue tout le temps sur ça, ce double aspect : la réalité triviale et la représentation imaginaire. Et, pour mieux montrer l’envers du décor, nous avons préféré le cacher un peu. Il y a très peu de plans larges dans le film. Il n’y a guère que les travellings qui dévoilent un peu plus.
Le choix des longues focales a permis aussi de filmer les acteurs différemment. Si le décor disparaît, les acteurs, eux, apparaissent plein cadre. C’est un film en gros plans, un film sur la peau, la peau des actrices, surtout, qu’on voit de très près, sous toutes les lumières. C’est quelque chose qui me touche beaucoup, la peau des actrices au cinéma, et qu’on voit pourtant de plus en plus rarement, tellement les visages sont masqués, retouchés, parfois même lissés par les opérations chirurgicales. Un mauvais maquillage, ou un maquillage inadapté, ça gâche complètement la vision qu’on peut avoir d’un film.
»



- « Au tournage, avez-vous laissé de la place à l’improvisation ? »

A. V. : « En choisissant de cadrer le film à l’épaule, nous avons choisi délibérément d’être dans une sorte de réactivité immédiate à tout ce qui pouvait se présenter, au moment du tournage. Nous nous sommes toujours laissés un espace d’improvisation qui permettait au chef opérateur de réagir en fonction des propositions des comédiens et à moi de rebondir ensuite. Sur chaque plan, il y avait donc une sorte de danse qui se mettait en place entre Pierre et les comédiens, il fallait qu’ils se sentent bouger mutuellement parce que les cadres étaient toujours un peu trop serrés, un peu trop justes, et que rien ne pouvait être codifié trop exactement. La seule vraie contrainte de ce mode de fonctionnement, c’est que j’étais obligée d’être collée au combo pendant la prise pour réagir et proposer des directions nouvelles. »

- « Comment s’est fait le travail avec les comédiens ? »

A. V. : « Je n’aime pas vraiment répéter, sauf si je sens que ça peut éventuellement modifier la vision d’ensemble de la scène ou permettre de préciser des dialogues. Je préfère accomplir un travail en amont avec les comédiens qui consiste à les faire entrer dans l’univers du film. Par exemple, Wanda de Barbara Loden m’a servi de référence pour parler à Miou-Miou de son personnage et de l’importance que peut avoir une coiffure pour le construire et lui donner une réalité immédiate. De mon côté, j’ai besoin de m’imprégner de ce qu’ils sont, de les connaître, de les regarder, parfois pour dépasser l’image - souvent très forte - qu’ils peuvent avoir comme acteurs. Le costume est une étape très importante dans ce travail préalable. Il dessine un corps, une silhouette, une manière de marcher... C’est important, même si, en définitive, dans Riviera, on voit surtout le haut des corps, rarement la silhouette toute entière. On a donc fait tout un travail sur l’apparence, la gestuelle des différents personnages, plus que sur le ressenti et le vécu.
Miou-Miou compose un personnage intérieur, très tendu, tout en regards. Elle existe dans chaque plan, avec presque rien. Mais, chez elle, le presque rien se compose de mille choses. Elle a une façon très personnelle de s’approprier le personnage qu’on lui propose, de l’habiter. Ainsi, elle a fait tout un travail de préparation dans l’hôtel pour s’imprégner des gestes quotidiens, répétitifs, du travail de femme de chambre. Pour elle comme pour moi, c’était très important qu’elle ne fasse pas semblant.
Vahina Giocante est une comédienne très sensuelle, très physique, ce qu’elle propose dans les moments de silence est toujours surprenant, et elle aime danser, ce qui était essentiel pour le rôle de Stella. Ça a été d’ailleurs un point d’appui important pour elle dans les moments où elle était déstabilisée par la violence du rôle : avec les séquences de danse, elle reprenait de la force et de l’énergie parce qu’elle était dans son élément. Après, ce qui a été compliqué à gérer pour elle comme pour moi, c’était le coeur du film, cette question de la beauté et de l’apparence : c’est très dur, pour une jeune et belle comédienne, d’incarner un personnage qui est dans l’aliénation, dans l’absence complète de maîtrise des situations, et qui ne doit exister qu’à travers ce qu’elle paraît être. On se pose toujours la question de la distance entre soi et le personnage. Vahina a dû se débattre avec cette question pendant tout le tournage, et elle s’en est sortie magnifiquement.
Avec Elie Semoun, le travail a été étonnamment simple, presque toujours évident. Il avait une espèce de familiarité avec le personnage, et il me semble en effet que Romansky pourrait presque avoir sa place dans “Les Petites Annonces”. À aucun moment je ne me suis dit qu’il s’agissait d’un contre-emploi. Elie est juste dans un autre tempo, plus retenu que celui qu’il pourrait avoir dans l’un de ses spectacles. Mais, l’avantage d’un vrai comique, c’est qu’il peut aller plus loin. Avec lui, toutes les inhibitions sautent. Elie porte une sorte d’excès permanent en lui, tout en restant humain. Pendant le tournage, il a toujours proposé des pistes nouvelles, avec une très grande liberté, et sans avoir peur des côtés les plus noirs de son personnage. Et puis, surtout, il est tendre. Je n’aurais pas supporté la scène très violente qui fait basculer le film sans cette tendresse qu’il porte en lui, et qui rend son geste désespéré au lieu d’en faire un pur acte gratuit.
Avant et pendant le tournage, je donne très peu d’indications psychologiques. J’ai conscience que c’est souvent difficile à accepter pour les comédiens, parce que, naturellement, ils ont besoin d’aliments consistants pour nourrir leur composition. Mais ce vide, cette absence, les laisse aussi dans un trouble qui est paradoxalement très riche. C’est le trouble de Vahina pendant les scènes avec Mathieu Simonet - pour incarner l’affreux play-boy, je voulais un ange, avec un côté très féminin. Evidemment, il ne faut pas se tromper sur les associations de comédiens, les couples que l’on forme dans le film. Le couple que forment Miou-Miou et Franc Bruneau me paraissait aussi plein de promesses, à cause de la spontanéité et du jeu très naturel de Franc, indispensables pour exister face à une comédienne aussi authentique et exigeante que Miou-Miou - et il les a tenues.
»



- « Et comment s’est fait le choix des musiques ? »

A. V. : « C’est un film très musical. Il y a d’abord eu une rencontre avec Marc Collin, tout simplement parce que j’avais aimé l’album Nouvelle Vague, que j’avais écouté et réécouté pendant la période des repérages, en parcourant en voiture la Corniche et la Promenade des Anglais. Pour l’ouverture du film, je trouvais très juste l’idée d’une musique intemporelle, à la fois contemporaine et nostalgique. La Côte d’Azur, ça renvoie sans cesse à un âge d’or dépassé... L’idée de l’album Nouvelle Vague, c’est précisément ça : un mélange miraculeux entre hier et aujourd’hui, des tubes rock réinterprétés en version Bossa Nova. Après ce choix initial, Marc m’a fait écouter ce qu’il avait composé, beaucoup de musiques électroniques, et aussi des albums inspirés directement par le cinéma, avec de vraies ambiances qu’on aurait pu croire piquées à des films américains de série B. Il y a eu un dialogue permanent entre nous, il m’a proposé des morceaux qu’il avait déjà écrits pour les scènes de boîte pour lesquelles je voulais une tonalité froide, presque déshumanisée. Il a composé aussi de nouveaux morceaux. La chanson I wish I was a boy que Marc venait d’écrire avec Muriel Moreno est arrivée pendant le tournage, sur un CD, presque par hasard. Ensuite, on n’a plus réussi à la lâcher : elle entrait en résonance avec le propos du film de façon un peu décalée, sans qu’on comprenne vraiment pourquoi ni comment, mais je n’imaginais plus le film sans elle. »

- « Quel est le sens de l’épilogue autour de la piscine ? »

A. V. : « Ça ne pouvait pas bien se terminer, il n’y avait pas de solution-miracle. Encore une fois, je ne crois pas aux miracles.
Par contre, je crois qu’on peut faire plusieurs lectures de l’épilogue. Une première lecture très factuelle : se dire que Stella a touché le fond. Mais pour moi, c’est la lecture la plus plate, la moins intéressante. C’est beaucoup plus fort de lire cette fin comme un cri de révolte, une sorte de libération. L’absence de révolte des personnages, tout au long du film, contre ce que la vie leur propose, c’est ce qui rend le film terrible. Personne ne crie jamais. Stella parle très peu, et ne sait jamais dire non. On ne lui a pas appris, tout simplement.
Alors, à la fin, quand arrive cette fille au piercing qui se met à hurler et dit enfin les choses telles qu’elles sont, c’est violent, parce que la fille est enragée, mais je me sens entièrement de son côté.
On peut relire aussi tout le film comme un parcours initiatique, l’histoire d’une désillusion : Stella a perdu son innocence, ce regard plein d’attente et de désir qui la rend attachante, au début. Mais, à la fin, elle est plus forte Son regard s’est durci. Elle est passée de l’autre côté du miroir. Peut-être que, maintenant, elle saura se défendre.
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Fiche technique
Réalisation : Anne Villacèque
Scénario : Anne Villacèque
Image : Pierre Milon
Son : Jean-Claude Brisson, Jean Mallet, Jean-Guy Véran
Montage : Anne Riegel
Costumes : Pierre Canitrot
Décors : Nicolas Chik
Musique : Marc Collin
Assistant mise en scène : Andrés Jarach
Direction de production : Philippe Hagège
Production : Agat Films & Cie - Nicolas Blanc
Coproduction : Arte France et Natan Productions
Avec la participation de : Canal + et de Cinécinéma
Avec le soutien : du Centre National de la Cinématographie, de la Région Provence Alpes-Côte D’azur, de la Sofica Millifin et de la Banque Populaire, Images 5
Distribution France : Bac Films
Distribution Internationale : Celluloid Dreams

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présentation réalisée avec l’aimable autorisation de
remerciements à Didier Deswarte et Mathieu Piazza
logos, textes & photos © www.bacfilms.com

Publié dans PRÉSENTATIONS

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