• Familia

Publié le par 67-ciné.gi-2006














Familia drame de Louise Archambault






avec :
Sylvie Moreau, Macha Grenon, Juliette Gosselin, Mylène Saint-Sauveur, Micheline Lanctôt, Patricia Nolin, Paul Savoie, Vincent Graton, Emily Holmes, Xavier Morin-Lefort, Jacques L'Heureux, Norman Helms, Sonia Vigneault et Alexandre Côté


durée : 1h42
sortie le 9 août 2006

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Synopsis
Michèle, criblée de dettes de jeu, débarque avec sa fille, Marguerite, chez son amie d'enfance Janine, une mère et épouse « parfaite ». Grossesse inexpliquée, sexe électronique, mensonges, remises en question seront au programme de cet été mouvementé, où chacun apprendra que les apparences sont souvent trompeuses…


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Entretien avec la réalisatrice Louise Archambault
- : « En écrivant Familia, quelle était votre idée de départ ? »

Louise Archambault : « Mon idée première pour ce film était de parler du manque de communication ou plutôt des défauts de communication, notamment au sein d'une famille élargie : quand on parle trop ou pas assez, les conflits que cela peut générer… J'ai écrit un premier jet et puis je me suis dit OK c'est bien beau la communication mais c'est très large comme thème et donc je me suis centrée plus particulièrement sur les relations mère/fille. Autour de ce principe, j'ai construit les personnages, deux mères et leurs filles adolescentes, qui me permettaient d'établir deux schémas différents mais avec des interactions entre les deux femmes. »

- : « Il est en effet beaucoup question de transmission de parents à enfants… »

L. A. : « Oui, j'ai voulu travailler sur la notion de legs. La question est posée au début du film : sommesnous prisonnier de notre héritage génétique ou bien libre de former notre propre personnalité ? On fait avec le bagage qu'on a reçu mais comment faire pour se défaire d'un comportement qu'on ne désire pas hériter de notre parent, qu'il soit inné ou acquis. C'est un sujet très ambitieux et j'ai beaucoup lu dessus. A une époque, j'aimais beaucoup les revues comme Science et Vie qui vulgarisent certains aspects de la science, notamment la biologie, la neurologie et la psychologie, et je me suis intéressée à une spécialité qui relie ces trois domaines : la neurobiopsychologie qui est encore en développement. J'ai aussi lu un livre très intéressant de deux Françaises : Mères-Filles une relation à trois. Selon elles, il y aurait trois façons de rompre le cycle du legs familial indésirable : ne pas faire d'enfant, se suicider et l'acceptation. J'ai choisi ce dernier aspect car je trouvais intéressant d'étudier dans un film le fait d'accepter son parent tel qu'il est pour pouvoir passer à une autre étape : travailler sur soi- même pour corriger ses tendances, ses défauts et ne pas reproduire avec nos enfants ce qu'on n’aime pas chez nos parents. On dit souvent que les problèmes des enfants découlent de leur relation avec leur mère. Il faut arrêter de penser comme ça et accepter de vivre notre vie avec un certain bagage familial. C'est à nous à évoluer dans notre propre voie. »

- : « Votre expérience familiale a-t-elle servi de trame au film ? »

L. A. : « Il y a beaucoup de choses dans mon film qui sont personnelles sans qu'il soit forcément autobiographique. En voyant Familia, ma mère ne se dit pas qu'elle est cette femme ou l'autre ; elle est sans doute un peu des deux… Certaines situations comme celle où une famille vient habiter avec l'autre et où tout finit en crise, ça je l'ai vécu avec une amie qui est venue chez moi… Le problème du jeu compulsif, ça aussi c'est dans ma famille. Mais je ne voulais pas mettre mes proches en avant, ce n'était pas le but. »

- : « Pouvez-vous nous expliquer le choix du titre en latin : Familia »

L. A. : « C'est le premier titre qui m'est venu à l'esprit quand j'ai commencé à écrire et je l'ai gardé. Au Québec, je ne sais pas si c'est dû à l'immigration italienne mais quand cela ne va pas avec notre entourage, on se dit souvent : "ah, la familia !", même si on n'a pas appris l'italien, c'est une expression récurrente. Pour moi, c'est un titre qui exprime l'amour, la haine, l'union, le conflit. Dans le mot familia, il y a quelque chose d'indessoudable, de viscéral, autant dans la douleur que dans l'amour. C'est inexplicable. »

- : « Comment voyez-vous vos deux héroïnes ? »

L. A. : « Dans la vie, on juge les gens assez facilement. Cela m'intéressait de jouer sur les apparences. En voyant Michèle et son problème de jeu compulsif, on peut se dire qu'elle est irresponsable et qu'elle ne peut pas élever sa fille correctement mais en même temps elle, elle a appris à communiquer ses émotions, à toucher, à aimer. Elle le fait peut être maladroitement mais elle a un bon fond. L'autre personnage, Janine, peut être froide, rigide, elle a besoin de tout contrôler : control freak comme on dit en anglo-québécois… Elle est comme ça mais c'est malgré elle. Elle aimerait peut-être prendre sa fille dans ses bras et lui dire je t'aime mais c'est plus fort qu'elle. J'avais envie de montrer leurs différentes facettes, il y a de l'ombre et de la lumière mais il y a aussi plein de zones de gris… J'aimais aussi le fait que ces deux femmes soient différentes mais qu'elles peuvent s'apporter l'une à l'autre et qu'elles peuvent aussi quelque part s'admirer… »


- : « A travers ce double portrait, vous semblez dire : il n'y a pas de mère idéale… »

L. A. : « Oui tout à fait. Il n'y a pas de mère idéale mais avant d'être mère, on est un individu, pas forcément idéal non plus. On fait ce qu'on peut avec ce qu'on est. Je voulais que mes personnages aient cette prise de conscience, qu'elles réagissent : je fais du mal à ma fille, y a-t-il un moyen de changer cela ? »

- : « Dans une scène amusante avec les enfants, il est question de familles recomposées, c'est un problème récurrent au Canada ? »

L. A. : « Oui, au Québec, il y a un mariage sur deux qui échoue. Et ces statistiques ne prennent pas en compte les couples en concubinage qui se font et se défont… Mais les familles recomposées, je ne vois pas ça comme un problème. Pour moi qui ait vécu cela, ce n'est pas forcément malsain. Janine a une petite famille unie, en apparence parfaite, mais elle galère comme Michèle. »

- : « Autre thème : l'adolescence. On retrouve le sexe, la drogue mais aussi les nouveaux dangers comme internet. »

L. A. : « Les dangers changent mais ce que vit un ado dans sa tête, cela reste pareil, peu importe qu'on soit en 1903, en 1950 ou en 2006. Ce qui change, ce sont les limites qu'on donne dans la société. On est peut être plus libéraux, moins sévères aujourd'hui… mais un ado trouvera toujours d'autres moyens pour dépasser ou briser les limites qu'on lui donne, pour se mettre en danger et trouver ses propres limites. Si on prend les deux ados du film, il y en a une dont la mère est trop stricte et l'autre dont la mère est trop permissive. D'un côté la première ado va vouloir briser l'encadrement, de l'autre la deuxième ado va vouloir s'en créer un, maladroitement. De toute façon, ça fait partie de la nature humaine que d'avoir des périodes de crises et stabilité. Je pense que ç'est bon aussi. »

- : « Autour des ces femmes, les hommes n'ont pas forcément le beau rôle… »

L. A. : « Certains le voient comme cela. Ce n'est pas fait exprès. Initialement, mes personnages masculins étaient plus développés mais du coup, je faisais un film de trois heures (rires), donc j'ai dû couper et faire des choix notamment pour bien définir les personnages féminins. Mais moi, je ressens moins le côté négatif des hommes car dans la façon dont j'ai construit mes personnages, les femmes non plus n'ont pas le beau rôle. Janine et Michèle ne sont pas des saintes, ni des bonnes mères, au contraire je pense que je montre plus leurs défauts que leurs qualités. Mais comme on a plus de temps à l'écran avec elles, on les comprend davantage. »

- : « Pour la mise en scène, vous aviez une idée précise ? »

L. A. : « C'était mon premier long métrage, donc je savais qu'on n'avait pas beaucoup d'argent et pas beaucoup de temps. A chaque jour de tournage, il fallait couper des scènes, travailler toujours dans l'urgence. Mais j'ai essayé de respecter mon canevas de base : un début de film très découpé, très rythmé et au fur et à mesure que l'histoire avance, des plans séquences qui s'installent avec moins de musique et plus de dramatique…
Faire un film, c'est l'art du compromis, avec comme priorité les personnages. Le fait d'avoir travaillé avant dans la production m'a aidé à respecter certaines limites budgétaires, à ne pas écrire n'importe quoi : est-ce que je peux écrire un film de science-fiction ? Oui, peut être si c'est un huis clos (rires).
»

- : « Comment s'est fait le choix des actrices ? »

L. A. : « Sylvie Moreau, je peux dire que je lui ai offert le rôle de Michèle. En cours d'écriture, son nom s'est imposé. Je cherchais quelqu'un qui était capable de donner un certain humour et une certaine sensibilité dans le drame sans être larmoyante. Je voulais quelqu'un de dynamique, qui a une énergie corporelle, physique et je savais que Sylvie pouvait me donner cela. Pour le rôle de Janine, j'avais presque déjà choisi une autre comédienne que j'adore et puis mon producteur m'a suggéré de voir d'autres actrices. Macha Grenon, que je connaissais dans d'autres rôles, n'était pas a priori celle que je cherchais, je la pensais trop sensible, à fleur de peau, et puis elle est venue à l'audition, elle a joué deux scènes et elle m'a complètement chavirée. C'était exactement ce que je cherchais, je ne pensais pas qu'il puisse exister quelqu'un capable de me donner cette espèce de dureté physique, cette froideur avec quand même des petits relents de vulnérabilité qui ressortent de temps en temps. »


- : « Et pour les deux jeunes filles ? »

L. A. : « Pour les ados, j'ai vu une centaine de filles en audition et j'avoue que Mylène St-Sauveur et Juliette Gosselin sont des actrices nées, très naturelles dans leur jeu et très matures pour leur âge. Du coup, je me comportais avec elles et je leur parlais comme avec les adultes. C'était facile de les diriger. Maintenant, elles travaillent beaucoup au Québec, j'espère juste qu'elles vont garder leur simplicité encore longtemps. »

- : « Vous avez reçu des prix pour votre premier film, cela vous encourage à continuer ? »

L. A. : « Oui bien sûr, c'est un honneur et un encouragement mais je ne visais pas cela. Je crois que c'est Lars Van Trier qui a dit "les prix, on s'en fout tant qu'on n’en gagne pas un"… Moi, je cherche avant tout à communiquer avec le public, à transmettre une histoire qui parle à beaucoup. C'est un peu rassurant de voir qu'on vit les mêmes situations. On est tous faits de chair et d'émotions. Quand je vois un film, je m'identifie à cela, et c'est cela que je veux donner aux autres aussi. »

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Fiche technique
Scénariste / réalisatrice : Louise Archambault
Producteur
: Luc Déry
Productrice
: Kim McCraw
Directeur photo
: André Turpin
Directeur artistique
: Pierre Allard
Monteuse
: Sophie Leblond
Concepteur sonore
: Sylvain Bellemare
Producteur délégué / directeur de production
: Gilles Legaré
Régisseur d'extérieurs
: Marie-Claude Belisle
Directrice de casting
: Lucie Robitaille
Preneur de son
: Pierre Bertrand
Premier assistant réalisateur
: Eric Parenteau
Scripte
: Johanne Boisvert
Décoratrice
: Nadine Petitleclerc
Accessoiriste
: André Charlebois
Costumes
: Annie Dufort
Directeur de post-production
: Erik Daniel
Musique
: Ramachandra Borcar
Chef électricien
: Dave Clark
Chef machiniste
: Robert Auclair

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présentation réalisée avec l’aimable autorisation de

remerciements
à Boris Pugnet
logos, textes & photos © Ctv International

Publié dans PRÉSENTATIONS

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