Water

Être sans destin drame de Lajos Koltaï

avec :
Seema Biswas, Lisa Ray, John Abraham, Sarala, Kulbushan Kharbanda, Waheeda Rehman, Raghuvir Yadav, Vinay Pathak, Rishma Malik, Meera Biswas, Manorma, Dr Vidula Javalgekar et Gerson Da Cunha
durée : 1h58
sortie le 6 septembre 2006
à partir du 06/09 au cinéma

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Synopsis
Le film se déroule dans l’Inde coloniale de 1938, au moment où Gandhi arrive au pouvoir. L’histoire commence le jour où Chuyia, âgée de 7 ans, perd son mari et est envoyée dans une maison où les veuves hindous vivent en pénitence. Agées de 18 à 80 ans, ces femmes paria à la tête rasée, mendient pour manger et passent leur temps à prier en attendant la mort.
L'arrivée de cette enfant curieuse et innocente va affecter la vie des autres résidentes. Et notamment celle de Kalyani, une belle veuve qui tombe amoureuse de Narayan, un jeune idéaliste, disciple de Gandhi.
Peu à peu, la présence de Chuyia va ébranler tout ce qu’elles se sont résignées à accepter et les pousser à se révolter contre la tyrannie de ce mode de vie dépassé et controversé.

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Propos de Deepa Mehta
Deepa Mehta : « Certaines images s’inscrivent de façon indélébile dans nos esprits. L’une des images qui me poursuit depuis dix ans, est celle d’une veuve hindoue de la Ville Sainte de Varanasi en Inde. Pliée comme une crevette, le corps desséché par l’âge, les cheveux blanc rasés très court, elle a détalé à quatre pattes, cherchant furieusement quelque chose qu’elle avait perdu sur les marches du Gange. Sa détresse était visible tandis qu’elle cherchait parmi la foule des premiers pèlerins du matin. Personne ne lui prêtait attention, pas même lorsqu’elle s’est assise pour pleurer, n’ayant pas réussi à retrouver ce qu’elle avait perdu.
C’est l’image de cette veuve, accroupie, les bras étendus sur ses genoux, la tête courbée en signe de défaite, qui s’est imprimée dans mon esprit et m’a donné l’idée d’un scénario qui, dix ans plus tard, est devenu le film Water.
J’étais à Varanasi pour réaliser un épisode des Chroniques du jeune Indiana Jones, la série télévisée de George Lucas. En guise de préparation, je passais les débuts de matinées sur les rives du Gange, essayant de m’habituer à cette ville qui attire les pèlerins de toute l’Inde. Parmi eux, se trouvent les veuves hindoues qui, en raison de croyances religieuses complexes, sont condamnées à une vie de privation et d’indignité. Elles viennent à Varanasi pour mourir. Mourir sur les rives de la Rivière Sainte leur garantit le salut immédiat.
Bien qu’hindoue moi-même, ces veuves m’apparaissaient un peu comme une anomalie, jusqu’à ce que je commence mes recherches pour Water. Leur condition m’a énormément émue. Ces femmes mènent leurs vies selon les préceptes d’un texte religieux datant de presque 2000 ans.

Water se déroule en Inde à la fin des années 1930, une époque où les mariages d’enfants étaient encore très répandus. Les jeunes filles étaient souvent mariées à des hommes plus âgés pour des raisons économiques.
Lorsque les hommes mouraient, ils laissaient derrière eux de jeunes veuves qui étaient alors enfermées dans des ashrams. C’est ce qui arrivait à la plupart des veuves, considérées par leurs familles comme un fardeau financier.
J’ai décidé de suivre une jeune veuve de 8 ans, et de décrire sa vie dans un ashram où sa présence commence à perturber et affecter la vie des autres résidentes.
En l’an 2000, après approbation du scénario par le gouvernement indien et armés de toutes les autorisations requises, nous avons rassemblé l’équipe technique et artistique de Water à Varanasi. Après six semaines de pré-production, nous avons commencé le tournage sur les rives du Gange. Nous n’aurions jamais pu imaginer ce qui allait se passer.
Une nuit, de violentes manifestations des fondamentalistes hindous ont éclaté dans la ville. Les décors ont été jetés dans la rivière, mon effigie brûlée, les protestataires ont défilé dans les rues de Varanasi, justifiant leurs actes en accusant Water d’être anti-hindou, dénonçant le film et sa description des veuves hindoues. Personne n’avait lu le scénario.
Abasourdis par la tournure des évènements, nous avons essayé d’obtenir de l’aide du gouvernement d’État qui avait approuvé le scénario, mais sans succès.
Entre l’intensification des protestations, l’escalade de la violence et les menaces de mort, nous avons dû interrompre la production.
Rétrospectivement, Water reflète bien d’une manière ou d’une autre ce qui se passait en Inde à ce moment-là : la montée en puissance des fondamentalistes hindous, leur intolérance pour toute chose ou toute personne qui les considèrent avec scepticisme ; dans tous les cas nous étions une cible visible et facile.
Water est alors devenu une mission personnelle, mais il a fallu quatre ans avant que David Hamilton, le producteur, et moi même puissions ressusciter le projet au Sri Lanka. Prendre le risque de retourner le film en Inde aurait été dangereux et imprudent.
J’ai du refaire tout le casting. La lumineuse Nandita Das, actrice principale de Fire et Earth, a du être remplacée par la jeune Lisa Ray. Seema Biswas, connue pour son rôle dans Bandit queen, a accepté de jouer Shakuntala à la place de Shabana Azmi. Pour le rôle de Chuyia, j’ai découvert une petite fille au Sri Lanka qui n’avait aucune expérience de la caméra mais était très naturelle... Elle a été incroyable.
Tourner au Sri Lanka a été un bonheur après l’horrible expérience de Varanasi. Giles Nuttgens était à nouveau derrière la caméra, comme pour Fire et Earth. Je pense que Giles est extrêmement doué. Dilip Mehta, mon frère, a réalisé les décors. Recréer l’Inde au Sri Lanka était une tâche intimidante. Nous avons décidé de ne même pas essayer de reproduire Varanasi. Le faire aurait signifié exploser le budget. Colin Monie a monté le film à Toronto. J’avais vu The Magdalene sisters, qu’il avait monté et senti qu’il avait le bon équilibre de sensibilité et de passion.
Maintenant que le film est terminé, je peux regarder en arrière le chemin parcouru.
L’angoisse, les menaces de mort, les politiques, l’affreux visage du fanatisme religieux... : nous en avons fait l’expérience.
Est ce que cela en valait la peine ? Je m’interroge souvent... Alors l’image d’une veuve aperçue dix ans plus tôt me revient à l’esprit, je la revois assise sur les marches du Gange, sa bouche édentée laissant échapper les sons du désespoir. J’ai découvert plus tard qu’elle avait perdu son unique paire de lunettes. Sans elles, elle était à moitié aveugle. »
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Salman Rushdie : « Water de Deepa Mehta est un film magnifique. Le jeu de toutes les actrices de la Maison des veuves est exceptionnel : intimiste, douloureux, blessé, tendre, brutal. Le lyrisme et la fluidité de la mise en scène provoquent un troublant contraste avec les difficultés arides rencontrées par les personnages. Le film a des choses sérieuses et ambitieuses à dire sur l’écrasement des femmes par des dogmes sociaux et religieux atrophiés. Mais, et c’est tout à son honneur, le film raconte cette histoire de l’intérieur, accentuant ainsi le drame humain de leur existence, et nous touchant droit au coeur. »
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Fiche technique
Écrit et réalisé par : Deepa Mehta
Directeur de la Photographie : Giles Nuttgens
Directeur Artistique : Dilip Meetha
Montage : Colin Monie
Musique : Mychael Danna
Costumes : Dolly Ahluwallia
Décors : Dilip Mehta
Production : David Hamilton
Co-Production : Telefilm Canda, Noble Nomad Pictures Ltd. et Echo Lake Productions Llc.
Producteurs exécutifs : Mark Burton, Ajay Virmani et Doug Mankoff
Ventes Internationales : Celluloid Dreams
Distribution : Films Sans Frontieres
Avec le soutient du, Cnc et de l’Unicef
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présentation réalisée avec l’aimable autorisation de
remerciements à Christophe Calmels
logos, textes & photos © www.films-sans-frontieres.fr