The last show

The last show comédie dramatique de Robert Altman

avec :
Meryl Streep, Lily Tomlin, Lindsay Lohan, Virginia Madsen, Maya Rudolph, Kevin Kline, Woody Harrelson, John C. Reilly, Tommy Lee Jones, Garrison Keillor, Marylouise Burke, L.Q. Jones, Sue Scott, Tim Russell, et dans leur propres rôles : Tom Keith (le bruiteur), Jearlyn Steele, Robin et Linda Williams, Prudence Johnson, Christopher K. Grap, Debbie Delisi, «The guys all-star shoe band» : Richard Dworsky (piano, orgue, direction), Pat Donohue (guitare), Andy Stein (violon, saxophone), Gary Raynor (basse), Arnie Kinsella (percussions) et avec la participation de : Peter Ostroushko (mandoline, violon) et Butch Thompson (clarinette)
durée : 1h40
sortie le 6 décembre 2006

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Synopsis
Un samedi soir pluvieux à Saint Paul (Minnesota), la foule se presse au Fitzgerald Theater pour assister au show radiophonique hebdomadaire A Prairie Home Companion.
Depuis trente ans, ses vedettes soul et country, ses joyeuses fausses réclames et ses amuseurs rétro ont atteint la gloire et survivent au règne de la télévision.
Les Johnson Sisters, Yolanda et Rhonda (Meryl Streep et Lily Tomlin), duo de chanteuses légèrement passées de mode, sont au bord de la crise de nerfs.
Dusty et Lefty (Woody Harrelson et John C. Reilly), héros d’un numéro de cow-boys à l’humour douteux, s’apprêtent à entrer en scène.
En coulisses, le chef de la sécurité, un ancien privé nommé Guy Noir (Kevin Kline), poursuit une jeune femme (Virginia Madsen) étrangement apparue...
Quant au maître de cérémonie de cette joyeuse petite entreprise, GK (Garrison Keillor), il présente l’émission de ce soir avec plus de détachement que d’habitude.
La station de radio vient d’être vendue à un groupe texan. Ce show est peut-être le dernier, mais le spectacle doit continuer.
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À propos du film
Depuis son lancement à l’antenne il y a plus de trente ans, A Prairie Home Companion est un phénomène radiophonique. Écrite, produite et présentée par Garrison Keillor, cette émission bien réelle propose à ses nombreux fidèles un savant mélange hebdomadaire de numéros musicaux, de saynètes humoristiques et de parodies de réclames. Aujourd’hui, près de quatre millions et demi d’auditeurs écoutent A Prairie Home Companion sur les 558 stations publiques qui la diffusent aux Etats-Unis. À l’étranger, le show est relayé par la BBC, par la radio irlandaise, sur le câble en Australie et en Nouvelle-Zélande et même sur les fréquences de l’armée américaine jusqu’en Extrême-Orient. Il est suivi dans 35 millions de foyers à travers le monde. En 2004, la Bibliothèque du Congrès a classé la première émission du 6 juillet 1974 au répertoire historique des archives sonores.
Diffusée depuis Saint Paul, capitale de l’état du Minnesota dont Garrison Keillor est originaire, A Prairie Home Companion (ou Le guide pratique de la Prairie), quelque part entre almanach campagnard et humour chansonnier, se distingue par un esprit caractéristique du Midwest, un ton affable, pragmatique et bienveillant. Le spectacle est tout à la fois artisanal et sophistiqué, habile sans tomber dans la roublardise. De valeurs robustes, il tire son charme délicat. Les sketches égratignent l’absurdité de la vie moderne, les sponsors imaginaires font leur réclame en promettant la lune contre l’achat d’un ruban adhésif ou de petits gâteaux... Et, comme dans les feuilletons radiophoniques d’autrefois, A Prairie Home Companion raconte chaque semaine les nouvelles aventures de ses héros maison. Ils sont tous un peu dingues, comme Guy Noir, le privé qui se prend pour un héros de Série Noire, ou Dusty et Lefty, deux gars un peu lourdauds dont les aventures sont contées dans La Vie des cow-boys. À l’antenne, Garrison Keillor interprète lui-même de nombreux personnages, tandis que Sue Scott ou Tim Russell prêtent leur voix aux autres. L’excellent orchestre de l’émission accompagne chaque semaine un ou plusieurs invités, des chanteurs de country, de folk, de gospel, de jazz ou d’opéra, et des instrumentalistes de bluegrass comme de musique classique.
Auteur prolifique et éclectique, Garrison Keillor a déjà écrit des essais, des nouvelles et des romans. Très attiré par la forme dramatique, il souhaitait se lancer dans un scénario. « J’avais toujours eu envie d’écrire une pièce ou un film, dit-il. C’est un peu ce que je fais déjà à la radio, mais le problème dans mon émission, c’est que j’écris toujours pour moi, or je ne suis pas du tout comédien. Je voulais écrire un scénario que de vrais acteurs puissent s’approprier. »
Encore fallait-il qu’un réalisateur se charge d’en faire un film, un metteur en scène qui ait un regard sur l’Amérique, un talent pour donner vie et authenticité à des lieux et à des personnages. Un réalisateur comme Robert Altman, pensait Garrison Keillor... De fait, un de ses amis connaissait l’avocat d’Altman, qui à l’époque tournait Company à Chicago. « Garrison Keillor ? répondit Altman à son avocat. Bien sûr que je vois qui c’est ! Ma femme écoute religieusement son émission toutes les semaines, et moi aussi de temps en temps. Je suis très fan ! »

L’avocat annonça donc au cinéaste que Keillor avait une idée de film et qu’il voulait qu’Altman le réalise. « Eh bien je serais très content de le rencontrer ! »
Un dîner fut donc organisé à Chicago. Entre l’auteur et le réalisateur, le caractère sobre, informel, détendu et amical de la rencontre allait donner le ton à la collaboration à venir. Les deux hommes sont originaires du Midwest (Altman est né à Kansas City dans le Missouri) et Keillor pense que cela les a aidés à s’entendre :
« Monsieur Altman n’est porté ni sur le baratin ni sur la flagornerie. C’est une caractéristique des gens du Midwest, il me semble. Ça rend les choses plus simples. Quand nous nous sommes rencontrés pour la première fois, et au cours de toutes les réunions qui allaient suivre, nous n’avons pas passé notre temps à nous dire combien nous adorions le travail de l’autre. Ça ne se fait pas, chez nous dans le Midwest. Manifester son envie de travailler avec quelqu’un suffit. La collaboration est le meilleur des compliments. »
Après avoir exploré plusieurs pistes de pure fiction, Altman et Keillor décidèrent de construire le film autour d’une émission de radio semblable au Prairie Home Companion. Altman y porte un attachement très personnel : « C’est par la radio que je me suis d’abord intéressé à la fiction. Je me revois, gamin dans les années 30, allongé par terre comme tous les gosses de l’époque, à écouter la radio pendant des heures. Jeune homme, mon idole était Norman Corwin, un de ceux qui ont inventé la dramatique radio. Et mes premiers boulots dans le métier, à part un peu de théâtre, étaient d’écrire des pièces radiophoniques. La radio est donc très proche et très chère à mon cœur. »
L’émission de Garrison Keillor a lieu chaque semaine, sur scène et en direct... Trois données qui ne pouvaient que séduire Altman, un metteur en scène qui s’est déjà illustré au théâtre comme à l’opéra, et qui a réalisé de nombreuses adaptations cinématographiques ou télévisées de pièces comme Streamers, Fool for love ou Reviens Jimmy Dean, reviens. « Le show de Garrison est destiné à la radio, mais c’est aussi un spectacle donné sur scène devant un vaste public. C’est de la radio, mais c’est aussi du music-hall, et cela m’a tout de suite interpellé. J’avais envie de filmer A Prairie Home Companion, mais aussi l’humour particulier de Garrison, et de tous les autres membres du show. » Filmer la parole ou le son, c’est aussi charger l’image d’une mission particulière, celle de révéler tout ce qui justement n’est pas audible : les regards et les gestes des artistes, la nervosité des techniciens, les petites histoires hors-micro, un vieux présentateur contraint d’improviser, une jeune chanteuse qui oublie ses paroles. Et la frontière invisible entre vie privée et représentation publique que franchit l’artiste en cheminant depuis sa loge vers son entrée en scène. Dans ces moments-là, The last show rejoint alors la famille des grands films américains sur le spectacle, sur le show-business de Broadway ou d’Hollywood, sur l’art et les contraintes d’être en représentation, sur le rapport nécessaire mais douloureux de l’individu avec le groupe.
Pour le scénario, Garrison Keillor a trouvé une sorte d’équivalent fictionnel à son Prairie Home Companion. L’émission filmée par Altman obéit aux mêmes lois du genre que son modèle et elle est présentée par un grand dadais du Midwest nommé G.K.... Mais loin d’être un immense succès à travers toute l’Amérique comme l’original , c’est un simple programme du week-end sur une station locale plutôt pépère. Pour brouiller plus encore les cartes, Garrison Keillor a repris trois personnages de son émission (Guy Noir, Dusty et Lefty) pour en faire de véritables protagonistes du film. Guy Noir est ici chef de la sécurité du théâtre (tout en gardant sa dégaine de détective privé), tandis que Dusty et Lefty ont ajouté des guitares à leur panoplie de lassos et de tabac à chiquer. D’autres personnages ont été créés pour le film, comme les Johnson Sisters. « Yolanda et Rhonda ont littéralement déboulé pendant l’écriture du script, dit Garrison Keillor. Elles sont les deux dernières d’un groupe country de quatre soeurs qui se produisaient avec un certain succès, il y a longtemps. Mais leur chance a tourné. Elles en sont aujourd’hui à se produire dans de petits galas, des fêtes communales, des écoles ou des églises, et à chanter à la radio. Ce n’est pas très glamour, comme vie d’artiste. J’adore ce genre de personnage : des perdants tenaces, résolus, dévoués, et souriants. Yolanda, c’est vraiment la fille courageuse, loyale, toujours pleine d’humour. »
Logiquement, le récit de Garrison Keillor est simple et linéaire, centré sur les personnages. L’action se déroule lors d’une émission comme les autres. Pourtant celle-ci pourrait bien être la dernière, puisque la station de radio vient d’être vendue. « Quand les personnages ignorent qu’une épée de Damoclès est suspendue au-dessus de leur tête, quand ils continuent leur petit bonhomme de chemin sans s’apitoyer, quand ils avancent jusqu’au bord de la falaise pour sauter (exactement comme le font les gens dans la vraie vie), alors là, ça m’intéresse. Mon but était d’offrir à M. Altman plusieurs possibilités intéressantes, sachant qu’il en couperait certaines, qu’il en reformulerait d’autres et que tout cela allait beaucoup changer. »

Le casting commença alors que l’écriture suivait son chemin. Meryl Streep fut la première à accepter le projet. « Pour moi, Meryl Streep devait absolument chanter dans le show, parce que c’est une chanteuse extraordinaire, je le sais », explique le scénariste. La grande comédienne avait effectivement déjà chanté dans Bons baisers d’Hollywood ou dans La force du destin, mais elle n’avait jamais tourné avec Robert Altman. « Ensuite, continue Garrison Keillor, je crois que Lindsay Lohan a déclaré à la presse qu’elle allait jouer la fille de Meryl Streep... Ma foi, c’était une excellente idée ! À partir de là, j’ai pu écrire en ayant des comédiens en tête. »
« J’ai reçu un coup de fil de Robert Altman, raconte Tommy Lee Jones. La plupart des acteurs l’attendent, ce coup de fil... Altman est un merveilleux réalisateur et il a cette réputation : on travaille pour lui, mais aussi avec lui. Parce qu’il respecte les acteurs et qu’il les considère comme partie prenante du film, pas comme une corvée dont il faut se débarrasser avant d’attaquer les vraies questions de cinéma. »
Dans cette troupe, Marylouise Burke (Sideways) est Evelyn, la cantinière, qui prépare les sandwichs pour les techniciens et les artistes. L.Q. Jones interprète le chanteur country Chick Akers, un pilier de l’émission. Vétéran du cinéma américain et acteur fétiche de Sam Peckinpah (Coups de feu dans la Sierra, Major Dundee, La horde sauvage, Pat Garrett et Billy le Kid, etc.), il a notamment tourné avec Raoul Walsh, Edward Dmytryk, Budd Boetticher, Don Siegel. L.Q. Jones apporte toute son expérience et sa douceur à un rôle discret mais décisif.
On retrouve aussi dans The last show de nombreux habitués du show radiophonique original, comme Sue Scott (Donna la maquilleuse) et Tim Russell (Al le régisseur). D’autres jouent dans le film leur propre rôle : le chef d’orchestre Richard Dworsky et ses musiciens, le bruiteur Tom Keith, les auteurs-compositeurs-interprètes Linda et Robin Williams ainsi que la chanteuse de gospel Jearlyn Steele.
The last show a été tourné en cinq semaines pendant l’été 2005 au Fitzgerald Theater de Saint Paul (Minnesota) où depuis 1978 Garrison Keillor produit chaque semaine A Prairie Home Companion. Les numéros de variété ont été filmés sur scène devant un véritable public, dans les conditions du direct, tous les techniciens du théâtre et de l’émission travaillant à leur poste habituel, main dans la main avec l’équipe du film. Comme pour Company, Robert Altman a constamment filmé à deux caméras, parfois trois, pour tourner simultanément dans plusieurs décors. « On pourrait dire que nous avons tourné ce film comme un documentaire, dit Altman. Nous n’avons pas essayé de camoufler nos caméras. On a procédé un peu comme pour une captation : la caméra est présente pendant l’action, mais rien n’est organisé pour elle. »
C’est la règle sur les films d’Altman : les comédiens sont encouragés à improviser et à développer leur personnage. Altman filmait les scènes dans leur continuité, de bout en bout, tandis que les caméras enregistraient les différentes actions sur scène et dans les coulisses. « Quelle que soit la scène écrite, Altman utilise l’image et la bande-son au maximum de leurs possibilités narratives, dit Lily Tomlin. On a quelque chose qui se passe ici et autre chose là-bas. Tous les acteurs ont leur propre micro, c’est une caractéristique de son style. »
« Il veut voir à l’écran tout ce qui est entre les lignes du scénario, ajoute Meryl Streep. Tous les imprévus, les petits accidents, c’est de l’or pour lui. Il peut tourner dix pages de script en une demi-journée, quand d’autres mettent en boîte une page et demie. Dix pages de dialogues, vingt personnages, trois caméras : tout le monde se lance, perd les pédales et fait ce qu’il peut. Ça devient électrique. »
« Yolanda et Rhonda sont si proches, leurs histoires sont tellement entremêlées, qu’elles finissent par terminer les phrases de l’autre, précise Lily Tomlin. Elles parlent en même temps, leurs phrases se chevauchent, la première se tait et l’autre repart tout de suite sur autre chose. Meryl et moi avons travaillé toutes les deux pour bien caler ça dès le départ. On a tout de suite trouvé le rythme. »
C’est à Kevin Kline que revient ici la lourde tâche d’incarner un des héros les plus populaires de A Prairie Home Companion, Guy Noir, un personnage interprété à la radio par son créateur, Garrison Keillor. Le comédien était déjà familier de l’émission et du personnage, et réécouta de nombreux sketches pour se préparer. « Le pari m’a vite passionné. À la radio, Garrison est tellement parti sur des pistes différentes avec ce personnage depuis des années que cela me donnait une grande liberté, parce que personne n’a jamais vu Guy Noir, personne ne sait à quoi il ressemble. Garrison m’a très généreusement laissé toute latitude pour que je donne vie à ce personnage. Je voulais d’abord rester fidèle à l’esprit du Guy Noir de la radio. Mais le fait que dans le scénario il soit gardien, qu’il vive dans son petit monde et qu’il perde un peu la tête, m’a libéré de toute contrainte. »

La femme mystérieuse qu’interprète Virginia Madsen n’est jamais nommée. C’est une envoyée céleste dont on sait tout d’abord peu de choses. Dans le scénario, Garrison Keillor l’appelle The Dangerous Woman :
« C’est un personnage qui a beaucoup évolué. D’abord, c’était une fan du show persuadée que le présentateur était amoureux d’elle. Elle se faufilait discrètement dans les coulisses en évitant toujours de se faire remarquer... Mais j’avais envie qu’elle soit au coeur de l’action. J’ai décidé de faire d’elle un ange, qui après un accident de voiture revient sur terre pour rendre visite aux artistes de son émission préférée. »
« C’est un personnage qu’on ne peut pas totalement expliquer, poursuit son interprète Virginia Madsen. Elle ne se considère certainement pas comme dangereuse, au contraire, elle est là pour accompagner les humains au paradis. Mais comme elle aime le spectacle, au lieu de repartir comme elle est venue, elle traîne un peu aux côtés de ces artistes qui vivent dans la fièvre de ce qui sera sans doute leur dernière représentation... Il est juste alors qu’ils aient un ange à leurs côtés. »
Cette frontière entre le monde des vivants et celui des défunts n’est pas le seul cadre que Robert Altman bouscule dans sa fable : entre la réalité et la fiction, les coulisses et la scène, le domaine privé et la représentation publique, les limites sont élastiques, changeantes, souvent indétectables. Les lents travellings éthérés du cinéaste semblent partir à leur rencontre.
Ce qui est bien réel, c’est la détermination forcenée d’une poignée d’artistes à continuer leur spectacle. Et le refus énergique, digne et intègre de leur patron, G.K., d’annoncer à l’antenne que ce sera la dernière émission. Pas de cris, pas de larmes. Ni fleurs, ni couronnes.
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Fiche technique
Réalisation : Robert Altman
Scénario : Garrison Keillor
Histoire : Garrison Keillor et Ken Lazebnik
Producteurs délégués : David Levy, Tony Judge, Joshua Astrachan, Wren Arthur et Robert Altman
Producteurs : William Pohlad, John Penotti, Fisher Stevens et George Sheanshang
Co-producteurs : Gerard L. Cafesjian, Armenia Film Studio, John H. Stout, Frederick W. Green et Patty Payne Green
Producteur associé : Lowell Dubrinsky
Directeur de la photographie : Ed Lachman, Asc
Montage : Jacob Craycroft
Chef décoratrice : Dina Goldman
Costumes : Catherine Marie Thomas
Musique arrangée et dirigée par : Richard Dworsky
Casting : Pam dixon mickelson
Sous-titres français : Françoise Monier et Jean-Pierre Carasso
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présentation réalisée avec l’aimable autorisation de
remerciements à Didier Deswarte, Mathieu Piazza et Mounia Wissinger
logos & textes © www.bacfilms.com
photos © Melinda Sue Gordon