• 4 heures 30

Publié le par 67-ciné.gi-2006













4:30 drame de Royston Tan


avec :
Xiao Li Yuan & Kim Young Jun


durée : 1h33
sortie le 26 juillet 2006



au cinéma

à partir du 2 août 2006, séances tlj 16h05 - 22h10 sauf mer en vost

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Synopsis
L’existence de Xiao Wu tourne autour de l’école, d’un appartement vide et du vague réconfort procuré par ses repas de nouilles instantanées. Un jour, cette routine est perturbée par l’arrivée d’un nouveau locataire, en proie à un chagrin d’amour. Pourtant, leurs chemins ne font que se croiser de temps à autre. Manquant cruellement de chaleur humaine, Xiao Wu tente par tous les moyens de créer un contact à travers les murs, réels et imaginaires, à cette heure spécifique entre la nuit et le jour.


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Entretien avec
Royston Tan
- : « Le public pourrait être choqué à l’idée qu’un jeune garçon puisse être laissé tout seul par ses parents. Vos deux films 4:30 et 15 traitent de l’existence de jeunes gens livrés à eux- mêmes. Pourquoi avez-vous choisi de représenter la vie de ces enfants ? »

Royston Tan : « C’est effectivement tout à fait intentionnel. 4:30 se concentre sur le point de vue du jeune garçon et sur ses souvenirs. Les souvenirs d’enfance ne sont jamais réels, ils sont construits. Je dirais même qu’ils sont constamment révisés, amplifiés et re-assemblés avec chacune des réminiscences afin de créer une image qui n’est pas nécessairement le reflet de la dure réalité.
Je pense que 4:30 et 15 ne peuvent pas être vus simplement comme une critique sociale. Les personnages de ces deux films ne sont pas des victimes. En fait, si je devais les re-situer dans ce contexte, je les verrais franchement comme des rebelles, résistant au statu quo.
»

- : « Xiao Wu tente tout au long du film de retenir l’attention des adultes autour de lui. Mais les adultes semblent être fermés à toute forme de dialogues. Est-ce une réflexion sur la disparité entre les générations à Singapour, le fait que les adultes soient irresponsables et incapables de communiquer ? »

R. T. : « Il s’agit d’une réflexion sur la différence entre un enfant et un adulte.
Je crois que les enfants sont plus à même de voir la vérité des choses. En tant qu’adulte, on se trouve des excuses et parfois on les répète tellement souvent qu’on finit par les intégrer complètement. A tel point que parfois nous sommes aveugles à la réalité.
»

- : « Le rôle des femmes dans les deux films est très secondaire, relégué à une voix-off, au téléphone ou à la télévision. Quelles étaient vos intentions en créant cet univers masculin ? »

R. T. : « Je n’avais pas vraiment planifié que 15 et 4:30 deviennent des histoires qui tournent exclusivement autour des hommes et des relations qu’ils peuvent avoir entre eux. Peut-être qu’à un niveau inconscient, cela vient de mes années de formation, passées principalement en compagnie de mes amis, des hommes.
Mais l’univers masculin est malgré tout l’un des principaux thèmes de 15. Le phénomène des gangs de rue chinois et des Triades était fondé sur la croyance en la fraternité des hommes. A l’époque, ce concept n’était pas vraiment issu de l’adhésion aux valeurs du genre masculin, mais plutôt aux valeurs chinoises comme la chevalerie, la loyauté et le sacrifice personnel. C’était intéressant de remarquer avec 15, que ce qui était à l’origine des principes très respectés sont aujourd’hui les valeurs de jeunes considérés comme marginaux.
A propos de 4:30, mes amis me disent que mes personnages semblent vivre dans une peur constante d’être émasculés, d’où l’absence de personnages féminins et leur apparition plutôt négative. Pour moi, dans 4:30, le genre féminin symbolise l’inévitable glissement progressif (comme le temps et le changement) de deux hommes égarés s’accrochant l’un à l’autre pour se réconforter.
»


- : « Où et comment ce film a-t-il été tourné ? Comment avez-vous trouvé et travaillé avec Xiao Li Yuan pour obtenir une performance aussi naturelle et nuancée de la part d’un si jeune garçon ? »

R. T. : « L’idée du film 4:30 m’est venue lors du tournage de 15, aux premières lueurs du matin, restant éveillé très tard pour la préparation du tournage du lendemain. En pleine nuit, je regardais la ville tentaculaire qu’est Singapour et j’étais attiré par les appartements allumés, dans cette cité s’étendant à l’infini. Je me suis mis à songer aux histoires nocturnes de ces gens insomniaques comme moi. Ressentaient-ils la même chose que moi ? Cet insupportable sentiment de solitude, et pourtant étrangement attachant ?
Le film a été réalisé dans un appartement abandonné de River Valley Road, un vieux quartier de Singapour, véritable étendue de magasins construits dans les années 50. Je voulais inclure une certaine intemporalité dans 4:30. Comme je l’ai déjà mentionné, c’était particulièrement important car le film est réalisé presque entièrement à partir du point de vue d’un enfant et de ses souvenirs.
J’ai rencontré pour la première fois l’enfant, Li Yuan, sur une minisérie d’horreur pour laquelle je travaillais. Sa capacité naturelle à entrer dans les rôles ainsi que son regard ont attiré mon attention. Ses yeux exprimaient toujours une certaine mélancolie, qu’il soit en train de sourire ou de rire. Après l’avoir choisi pour le personnage de 4:30, j’ai passé plusieurs mois avec mon co-auteur Liam Yeo à adapter le rôle pour lui.
Travailler avec un enfant acteur n’est jamais facile, particulièrement quand il s’agit de leur faire exprimer des émotions. Ce que je désirais capter lui demandait d’être honnête avec ses propres émotions et par là même la confiance entre nous devait être totale. Heureusement nous nous sommes ouverts l’un à l’autre et sommes devenus très rapidement amis, ce que j’essaye d’habitude d’éviter quand je travaille avec les acteurs.
»

- : « Vous avez rencontré beaucoup de problèmes avec la censure de Singapour pour votre film 15. Est-ce que les choses s’améliorent pour les artistes de Singapour ? »

R. T. : « L’ouverture de Singapour en terme de liberté d’expression, ne doit pas être le résultat d’encouragements économiques. Le pouvoir en place doit voir qu’il est nécessaire, voire impératif, que la liberté d’expression artistique soit autorisée (dans des limites réalistes et avec la considération de la sensibilité nationale). L’expression personnelle est naturelle et instinctive. Alors que Singapour mûrit en tant que société, la liberté d’explorer notre identité et notre âme collective est désormais cruciale pour son développement. Cela dit, je crois également que toutes les sociétés pratiquent des formes de censure, d’une manière ou d’une autre. Ce que je n’accepte pas personnellement, c’est la censure non justifiée. »


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Fiche technique
Réalisateur : Royston Tan
Scénario : Royston Tan et Liam Yeo
Producteurs exécutifs : Eric Khoo et Jacqueline Khoo
Producteurs : Gary Goh, James Toh et Makota Ueda
Producteurs associés : Chieko Murata et Tan Fong Cheng
Photographie : Lim Ching Leong
Montage : Low Hwee Ling
Son : Justin Seah
Musique : Hualampong Riddim
Directeur artistique : Daniel Lim
Produit par : Zhao Wei Films
Post-production : Infinite Frameworks (Singapour), Kantana Animation Co., Ltd. (Thailande)
Post-production son : Yellow Box Studios (Singapour), Kantana Animation Co., Ltd. (Thailande)

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présentation réalisée avec l’aimable autorisation de
remerciements à Stéphane Auclaire, Vincent Brançon, Magali Montet, Gordon Spragg et Virginie Thorel
logos, textes & photos © www.celluloid-dreams.fr

Publié dans PRÉSENTATIONS

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